Reims dans la guerre en 1916.

En 1916 seulement cinq conseils municipaux se tiennent à l’Hôtel de Ville, soit deux de moins qu’en 1915. Les séances ont lieu le 16 février, le 9 mai, le 11 mai, le 19 juillet et le 27 octobre. Comme c’est le cas depuis les débuts du bombardement, les conseils ont lieu dans l’après-midi et ne regroupent qu’entre 12 et 15 participants sur un effectif total de 35 conseillers. Ce faible nombre de présents entraîne d’ailleurs une question du conseiller radical, Clovis Chézel, lors de la séance du 16 février 1916. Il veut savoir si les règles de convocation sont bien respectées lorsqu’une séance du conseil est prévue.  Si la réponse du maire est totalement affirmative en ce qui concerne les conseillers restés à Reims et ceux qui, partis de Reims, ont manifesté le désir d’être convoqués, elle est moins assurée pour les autres. Il croit savoir que dans ces cas-là la convocation est également faite pour ceux qui n’ont rien demandé mais dont la résidence est connue.

De toute évidence, les éléments liés à la guerre sont omniprésents. Chaque conseil commence par les remerciements aux généreux donateurs qui ont fait parvenir à la municipalité des sommes en argent, le plus souvent modestes, ou en nature. On vote aussi régulièrement les crédits nécessaires à l’achat des denrées pour le ravitaillement de la population civile ainsi que les subventions au Bureau de bienfaisance pour secours aux réfugiés et de chômage. Les conséquences des bombardements apparaissent en filigrane des séances. La municipalité prend à sa charge les funérailles des employés municipaux victimes de bombardement dans l’exercice de leurs fonctions. Le 16 février 1916, le conseil vote des félicitations au personnel du service des eaux qui « a pu assurer une distribution constante malgré le danger que lui faisait courir l’exécution de travaux de réparations dans une zone violemment bombardée ». Une partie de cette eau est d’ailleurs réquisitionnée par l’armée, ce qui entraîne un litige porté devant le tribunal civil, entre les militaires et la municipalité. Les premiers entendent bénéficier d’un tarif réduit de 17 cts le m3 alors que la seconde entend appliquer le tarif normal de 27 cts. Le 9 mai 1916, le conseil accepte la demande de la Société La Champenoise de résilier son adjudication du droit d’affichage sur les propriétés communales et sur les colonnes postales car, du fait des bombardements, la plupart des supports d’affichage sont détruits et, du coup, l’entreprise se trouve dans l’impossibilité de payer la redevance annuelle de 2 500 francs.

Le conflit s’invite enfin dans les dénominations de rues comme le montre la séance du 27 octobre 1916. Après avoir rendu hommage aux « valeureux défenseurs de Verdun », le conseil décide de débaptiser la rue Georges-Hermann Mumm (dont la dénomination datait de 1903) et de lui donner le nom de rue de Verdun. Ce changement de dénomination, appuyé par une pétition des habitants de la rue, est à rapprocher de la mise sous séquestre de la maison Mumm, considérée comme allemande, et à l’internement de son dirigeant, Maurice Mumm, au fort de Lanvéoc en Bretagne.

Mais la grande affaire reste la question financière. Alors qu’avant-guerre les budgets municipaux étaient excédentaires chaque année de 400 000 francs en moyenne, la situation s’est totalement retournée. Avec le conflit, les recettes ont baissé des 4/5e alors que les dépenses sont demeurées globalement stables. En effet, la mairie continue de payer, au moins partiellement, les fonctionnaires municipaux mobilisés. Elle a aussi dû embaucher du personnel supplémentaire dans plusieurs services comme la police, la voirie ou les pompiers. Enfin, les frais d’assistance ont connu une hausse croissante. Au 31 mars 1916, le déficit des finances municipales atteint presque 6 millions de francs. Cette somme correspond à des avances faites à la Ville, en particulier par la banque Chapuis, ou à des fournitures qui ne sont pas encore réglées. Or, avec un déficit aussi élevé, la municipalité éprouve de plus en plus de mal à trouver du crédit pour ses dépenses courantes. Certes, l’Etat s’est engagé à prendre en charge la moitié des déficits de 1916 mais ne s’est pas avancé sur les déficits antérieurs. La municipalité décide donc, dans ces conditions, de solliciter un emprunt de 2 millions de francs auprès de la Société des prévoyants de l’avenir. Mais, comme le précise bien Jean-Baptiste Langlet, cet emprunt ne s’applique pas à la liquidation des dettes actuelles mais au paiement des charges budgétaires courantes. Deux séances, les 9 et 11 mai 1916, sont consacrées à la discussion sur ce projet d’emprunt que la ville est finalement autorisée par l’Etat à contracter le 4 juillet.


 

Dernière mise à jour : 21 octobre 2022

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